14/01/2011 : La Révolution « de chez moi »

Publié le par les 3eme science 2


  

tunisiaCela fait maintenant quatre jours que je n’ai pas mis les pieds dehors. Plantée durant toute la journée devant le carré magique, je ne fais que suivre des yeux, avec avidité, les vidéos et les reportages diffusés et écouter les gens du monde extérieur parler. Entre France 24, Arabia TV, Jazzera et Nessma, je participe à tous ces débats en réfléchissant, en analysant et en écrivant.

 

Je n’avais pas peur. Non ! J’étais même prête à sortir, à parler, à faire partie du soulèvement, mais que faire avec une mère dont la peur est plus grande que l’océan et avec un père qui a un poste - comme le dit toujours ma mère – « délicat ». La bande rouge d’informations serpentait au bas de l’écran, les informations s’y renouvelaient, parfois même niant ce qui avait déjà précédé. Avez-vous déjà vu une nation où se sont faufilés trois présidents dans l’intervalle de deux jours ?! Maintenant oui ! Cela, au fait, m’a fait un peu rire!

      Par contre, ce qui m’a effrayé encore plus que jamais c’étaient les « gangsters » armés qui entraient dans les maisons des gens, les maisons de leurs frères tunisiens, pour voler et dérober une cuisinière, un réfrigérateur, un écran plasma…Je les voyais de notre terrasse, mon emplacement stratégique d’espionnage. Notre maison se situe en haut d’une petite colline, c’est pour cela j’avais l’avantage de pouvoir tout voir. Sur l’avenue principale - l’avenue Habib Bourguiba- et dans les petites ruelles goulettoises, zigzaguaient les voitures volées sans matricules. J’ai vu de mes propres yeux un homme cacher un véhicule dans le garage du mécanicien de notre quartier. J’ai entendu les cris atroces et déchirants d’une femme qui avait perdu son fils âgé seulement de sept ans dans la foule, apparemment, il était sorti en courant fasciné par cet hélicoptère qui flottait dans le ciel depuis quelques heures déjà : le pauvre ne comprenait pas bien ce qui se passait autour de lui, ni le grave danger qui le menaçait. Les sons des cartouches et des balles déchiraient le silence de la nuit. Mon ouïe s’est, vraisemblablement, développée et est devenue plus fine : je crois bien que mes oreilles ont même acquis la capacité de distinguer le son des pistolets de celui des fusils. Je respirais l’air empoisonné par la fumée sombre qui ne voulait se dégager du ciel déjà grisâtre, formant de petits monstres affreux représentant à la fois la haine et la folie du peuple. Ces créatures s’estompaient progressivement pour donner vie, à chaque fois, à d’autres formes nouvelles mais toujours aussi affreuses !

      Seuls à la maison, ma mère, mon frère âgé de douze ans et moi étions tous, à la fois, émus par le Réveil des Tunisiens et la gratitude des autres peuples , horrifiés à l’idée d’être attaqués par un de ces psychopathes ,et, désolés pour les sangs déjà coulés. Papa, bien sûr, était à son travail ; on ne l’avait pas vu depuis deux jours. Cette nuit-là, on a tous dormis dans la même chambre. Cela fait presque sept années que je n’ai pas étalé mon dos et fermé les yeux sur le lit de mes parents. Mais, cette fois, c’était différent. Ma mère - comme je l’ai déjà dit- était une femme très sensible au « cœur faible ». Aussi, elle était plus peureuse qu’un agneau devant un loup dans la forêt. Elle pleurait de longues heures et appelait mon père d’un moment à l’autre juste pour « écouter sa voix ». C’était alors à moi de la consoler et de lui faire oublier ce qu’elle entendait dehors. Je lui disais même que les balles qu’on était en train de tirer étaient des balles à blanc et que les soldats ne faisaient que tirer, probablement, en l’air ou sur le sol pour faire peur aux voleurs et pour apaiser le sens de l’aventure chez ceux qui se croyaient assez fort pour sortir la nuit alors que c’était le couvre-feu. Elle sursautait au moindre bruit, au moindre grincement. Je la rassurais en prétendant que c’était seulement un chat se cachant dans notre jardin ou un chien cherchant refuge dans notre garage. Je la faisais, par moments, sourire, surtout quand je lui disais que je la protégerai de tout danger. Mes promesses, cette nuit-là, ont atteint les centaines, mes mensonges, voire, les milliers… Moi aussi, l’angoisse m’envahissait de la tête au pied mais pas la peur. Je ne voulais surtout pas que l’on détruise tout ce qu’ont fait les tunisiens, après cette aussi longue hibernation de plus d’un quart de siècle. En effet, ces vols, ces incidents, ces incendies, ne faisaient que nous ramener à un passé très proche. Je ne voulais pas que les compliments d’Obama, de Sarkozy… se transforment en remontrances, ou, pire encore, en prétextes pour nous ensevelir dans « le pétrin » de la colonisation. Je voyais bien que la situation ne faisait qu’empirer de plus en plus. Le rêve des tunisiens devenait progressivement un cauchemar !

 

OUTIl faudrait seulement comprendre qu’il faut agir et non pas réagir. C’est ce que j’ai toujours dit depuis la mort de « Bouazizi ». Il faudrait, certes, faire preuve de civisme mais aussi de respect envers le sang de ce monsieur et ses brûlures qui ont été le principal motif au changement radical de la Tunisie. Oui ! C’est grâce à ce marchand de légumes que Ben Ali est sorti du pays. Seulement, il faut continuer tout droit après cette première tentative victorieuse. On est, nous les tunisiens, le premier peuple arabe à se battre pour la vraie justice, la vraie liberté, on est le premier peuple arabe à dire « NON » à haute voix, à refuser les circonstances que certains nous ont imposées pour vivre avec, à chasser un président ayant déjà les racines ancrées au « trône »  depuis le fameux « couronnement » du 7 Novembre ! Nous, on est le premier peuple arabe, depuis longtemps, qui a défendu sa patrie ! On est le premier aussi qui a choisi ! ON A CHOISI ! Il faudrait, par conséquent, être solidaires, avoir la main dans la main, se fusionner dans un même corps, un même esprit, organiser nos idées, être civilisés, continuer sur ces pas dans le bon chemin de la liberté, avancer tous ensemble la tête haute pour une même Tunisie, une Nouvelle Tunisie ! Nous soutiendrons tous nos principes et nos convictions et accepterons ceux qui leur sont différents avec civilité, ainsi,  nous agirons pour l’intérêt public de notre belle patrie ! On militera pour plus de solidarité et de justice et on appellera à plus de responsabilités ! Chacun de nous devrait tenir à l’autre car cet autre, si on ne le respecte pas, si on ne le défend pas, si on ne l’aime pas, il pourrait « tomber dans le faux » et ruiner tout ce qui a déjà été atteint.

 

Soyons amis, soyons unis, ayant un seul but devant nous : le bonheur de notre Tunisie ! Cette patrie qui nous a tant donné, nous a abrités, mais, malgré cela, a tant souffert pendant des années et des années. Elle a maintenant besoin de nous et c’est à notre tour de la protéger et de la sauver de tout traître, de tout violeur… Soyons unis et solidaires pour reconstruire, ensemble, cette Tunisie tant voulue, cet avenir tant rêvé et attendu !

                                                                                                         J.Fattoun(élève)      

                                                                                                                     

                                                                                                                      

 

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